La condamnation de Sarkozy montre enfin que les présidents français ne sont peut-être plus au-dessus des lois | Nicolas Sarkozy

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Lundi, un tribunal correctionnel de Paris a rendu son verdict dans le procès pour corruption de Nicolas Sarkozy. L’ancien président français a été condamné à trois ans de prison – dont deux avec sursis – pour corruption et trafic d’influence.

Il s’agit d’un jalon juridique pour le système judiciaire français pour deux raisons principales. Premièrement, aucun ancien président n’avait été condamné à une peine de prison réelle depuis le leader collaborationniste français, le maréchal Pétain en 1945. (Cela dit, la peine d’un an de prison de Sarkozy ne sera probablement pas passée derrière les barreaux, mais en résidence surveillée avec une étiquette électronique). L’ancien président Jacques Chirac a été condamné à deux ans de prison avec sursis en 2011 pour détournement de fonds publics alors qu’il était maire de Paris.

Et deuxièmement, le système judiciaire français a longtemps été considéré comme respectueux du gouvernement en place dans les affaires politiques sensibles. Cette décision de justice va certainement à l’encontre de cette tradition. Il a fallu beaucoup de ténacité de la part du Parquet National Financier (l’institution judiciaire chargée de traquer les délits financiers complexes) pour contrer les tentatives de Sarkozy et de ses alliés de saper son autorité. En fin de compte, l’indépendance du pouvoir judiciaire et la primauté du droit ont prévalu. C’était aussi le triomphe de la démocratie: preuve qu’aucun citoyen, aussi puissant soit-il, n’est au-dessus des lois.

L’affaire était centrée sur des conversations téléphoniques entre Sarkozy et Thierry Herzog, son ancien avocat. Ces appels ont été surveillés par la police française à partir de septembre 2013, dans le cadre d’une enquête sur les allégations selon lesquelles Sarkozy aurait reçu un don illégal et non déclaré à sa campagne présidentielle de 2007 de la part de Mouammar Kadhafi, alors chef de la Libye. (Sarkozy a nié toute irrégularité.) Dans le même temps, une enquête policière distincte était en cours sur des allégations selon lesquelles Sarkozy avait reçu des paiements illégaux de l’héritière malade de L’Oréal Liliane Bettencourt pour la campagne 2007. (Ces accusations contre Sarkozy ont été abandonnées en octobre 2013.)

Le tribunal a appris que des conversations entre Sarkozy et Herzog en 2014 suggéraient que Sarkozy avait promis à un magistrat principal, Gilbert Azibert, un poste de haut niveau à Monaco en échange d’informations privilégiées sur l’enquête Bettencourt.

La juge Christine Mée a jugé que des preuves convaincantes démontraient un «pacte de corruption» entre Herzog, Azibert et Sarkozy lui-même.

Elle a conclu que Sarkozy, un ancien avocat, «savait qu’il faisait quelque chose de mal». Ses actes et ceux de son avocat avaient donné au public «une très mauvaise image de la justice, ce qui appelait une sanction pénale». Elle a également ajouté que les crimes de Sarkozy étaient «extrêmement graves parce qu’ils avaient été commis par un ancien président qui, constitutionnellement, devrait garantir l’indépendance de la justice».

Le verdict accablant n’a pas fait taire les partisans politiques de Sarkozy. Ils se sont précipités vers les studios de diffusion pour dénigrer la décision et critiquer les juges, mettant en doute l’équité et l’indépendance de ce qu’ils considèrent comme un «verdict politique». Cette réaction rappelle les attaques de Silvio Berlusconi contre des magistrats italiens – que l’ancien président italien a qualifiés de «juges rouges».

Plus inquiétante, cependant, a été la réaction de Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur de droite, dont le rôle est de lutter contre la corruption. Bien que dans le gouvernement d’Emmanuel Macron, il est un ancien membre du parti de Sarkozy. Quelques minutes après la publication du verdict, il a déclaré son «soutien amical» à l’ex-président. Une telle déclaration pourrait être un coup de pouce massif pour l’extrême droite – dont le soutien se nourrit du sentiment que l’élite française est toute pour elle-même. La réaction du public sur les réseaux sociaux a été incandescente.

Plusieurs amis et associés de Sarkozy ont également été condamnés séparément pour des fautes financières, notamment son mentor politique Charles Pasqua, son ancien Premier ministre François Fillon, son ancien chef de cabinet Michel Gaudin et un ancien proche conseiller, Boris Boillon. Pourtant, malgré un tel bagage, Sarkozy a récemment été présenté comme le candidat conservateur potentiel pour l’élection présidentielle de 2022. Et, alimentant davantage la méfiance à l’égard de l’élite politique, Macron aurait été en termes cordiaux avec Sarkozy avant sa condamnation. En 2018, l’actuel hôte de l’Élysée a même demandé à Sarkozy de le remplacer lors d’une cérémonie d’État.

Comment Macron, le jeune dirigeant libéral jadis fêté, aurait-il pu être si imprudent et divertir le président le plus polarisant de l’après-guerre? Comment aurait-il pu se lier d’amitié avec quelqu’un qui incarne le «bling» et qui a jadis lancé une attaque étonnante contre la «permissivité morale et intellectuelle de mai 1968» et les attitudes progressistes et libérales qu’elle annonçait?

Les critiques de gauche peuvent soutenir que les hommes sont les deux faces d’une même médaille néolibérale-autoritaire. Cependant, ce qu’ils ont en effet en commun, c’est qu’ils ont tous deux été élus à la présidence de la Cinquième République – la «République gaulliste», née en 1958 en réaction à la guerre coloniale française en cours en Algérie. Il attribue des pouvoirs constitutionnels extraordinaires au président mais lui impose peu de responsabilités. En conséquence, les électeurs français élisent un «hyper-président» ou un «monarque républicain» avec toute la pompe qui va avec. Il n’est pas surprenant que les présidents, une fois en fonction, soient rapidement perçus comme déconnectés.

La marque Sarkozy est désormais irréversiblement contaminée et sa carrière politique est terminée. Il doit comparaître à nouveau au tribunal plus tard ce mois-ci pour la soi-disant affaire Bygmalion, dans laquelle il est accusé d’avoir trop dépensé dans sa campagne de réélection infructueuse en 2012.

Les procès Sarkozy annoncent peut-être un changement de culture politique en France. L’ère des présidents arrogants et distants qui semblent intouchables et au-dessus des lois est peut-être sur le point de se terminer. Cette condamnation pénale intervient à un moment où les Français sont exaspérés par le manque de responsabilité de leur président. Avec les élections présidentielles qui auront lieu l’année prochaine, et la gauche et l’extrême droite désireuses de capitaliser sur le mécontentement du public à l’égard du système, qui sait quelles pourraient en être les conséquences politiques?

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